(ou la revanche de l’image oubliée)
La bibliothèque idéale d’Empain, détail, 2021, CC-BY Bruno Goosse.
Fusées, force atomique, mines d’uranium, tout cela laisse présager un avenir fantastique pour ce pays vide. Rien d’étonnant à ce qu’une agitation mal réprimée règne dans tout le Territoire du Nord. Au cours de mes voyages, j’ai rencontré un seul homme qui semblait rester en marge de ce bouleversement. C’était un géologue tchécoslovaque de la Jungle du Rhum, qui venait d’arriver en Australie après avoir réussi à franchir le rideau de fer. La vie n’avait pas été très gaie à Prague, à la suite du coup d’état communiste. Maintenant, cet homme lisait paisiblement le Journal d’André Gide, assis sous un bananier. « Ce pays me plaît beaucoup » me dit-il. « Beaucoup d’Européens s’ennuient dans la brousse australienne, mais elle m’apporte tout ce que je désire. Je peux avoir de la musique, des livres et de l’espace… J’ai assez vu un autre genre d’univers en Europe. Ici, on peut mener une vie simple. »
Mais il me semble qu’il n’aurait pas longtemps la chance de goûter une vie simple dans la Jungle du Rhum. Un bulldozer travaillait au milieu des manguiers et des bambous. Des ouvriers édifiaient les premières maisons pour les mineurs. Il ne fallait pas beaucoup d’imagination pour prévoir la construction d’une ville complète, avec des bâtiments climatisés, une garde de sécurité, un aéroport, une pile atomique, et toutes les choses merveilleuses qui peuplent le rêve du blanc. (Moorehead, 1956, pp. 111-112)
L’été dernier, je testais auprès d’un co-organisateur, ce que j’envisageais de rédiger et qui me semblait être la rencontre entre l’objet de mon travail à ce moment-là et l’objet de ce qui se nomme ici « image en tr@nsit ». « Entre la rencontre et la justification par adéquation, entre l’aléatoire et l’adapté, quel pont peut-on espérer projeter1 ? » se demande François Jullien (2017) en faisant jouer le concept de dé-coïncidence. N’ayant ni plaisir ni intérêt particuliers à être hors sujet, j’étais animé d’un questionnement similaire. Je disais à mon interlocuteur avoir été étonné de ce qui m’apparaissait comme une nouvelle mise en circulation de vieux livres sans grande valeur, rendue possible par la mise en réseau de bouquineries de seconde main. Ce réseau, par son existence, modifie le rapport que l’acheteur de bouquins entretient avec le hasard de la rencontre. Lorsque j’entre dans une librairie d’occasion, ce n’est pas dans l’intention d’y acheter un livre précis. Ce serait trop décevant. Je regarde ce qu’il y a, je fouille, je passe du temps à lire des titres, des noms d’auteurs et d’autrices, parfois des quatrièmes de couvertures, me laisse finalement séduire par un objet que je rencontre, et je sors avec un livre que je n’imaginais pas acheter. La récente mise en réseau du contenu des bouquineries modifie ce rapport à la rencontre hasardeuse. En les inscrivant dans des bases de données partagées, ces livres deviennent accessibles à un nombre d’acheteurs potentiels sans rapport avec le nombre de personnes physiques qui pourraient franchir la porte de tel ou tel commerce. La mise en réseau modifie ainsi la valeur commerciale de ces livres. J’ai vu mon interlocuteur froncer les sourcils. Il me rappela qu’il s’agissait d’images en tr@nsit et qu’il ne m’avait pas entendu parler d’images. C’était exact. Pourtant, les livres dont je voulais parler contiennent des images. Je voulais partager les images des livres. Mais j’étais quand même un peu ennuyé et me demandais si l’on pouvait rapprocher à ce point la circulation de livres contenant des images et la circulation des images.
Bruno Goosse, Vous êtes-vous lavé les mains ?, vue de l’exposition, 2021. CC-BY Bruno Goosse.
Quelques temps plus tard, en automne, je présentais à Bruxelles l’exposition « vous êtes-vous lavé les mains2 ? ». Cette exposition s’intéressait à la figure d’un philanthrope belge, Louis Empain, et plus particulièrement à deux de ses réalisations : un préventorium pour enfants issus de milieux défavorisés, construit au milieu des années 30, et le livre qu’il a co-écrit avec Marcel Jadin : Nos enfants lisent, répertoire des meilleurs livres pour la jeunesse à la fin des années 50.
Me servant de ce répertoire comme d’un guide, grâce à la mise en réseau des bouquineries, j’ai retrouvé une partie importante des livres recommandés par Louis Empain, reconstituant ainsi ce que j’ai nommé sa bibliothèque idéale. Les livres étaient exposés sur une table, comme ils le sont habituellement dans une librairie. Le visiteur pouvait les feuilleter.
En regardant attentivement cette table dans la galerie, un ami libraire me disait qu’aucun des livres exposés n’aurait été acheté s’il avait été proposé à l’achat au comptoir d’une des bouquineries qu’il gère. Ces livres-là, ses acheteurs n’en veulent pas. S’ils font partie d’un lot, acquis comme un tout, ils sont jetés lorsque l’ensemble est trié. Pourtant, véritable institution des livres d’occasion à Bruxelles, occupant de vastes espaces dans plusieurs implantations, ses bouquineries ne manquent pas de place. Mais le souci des bouquinistes est d’éviter ce qu’ils appellent les livres dormants, ceux qui prennent la poussière dans les rayons sans trouver acquéreur. Aussi, les employés chargés des achats évaluent-ils le temps supposé que ces livres resteront en rayon avant d’être choisi par un client. Selon mon ami, les livres de la bibliothèque idéale d’Empain n’avaient aucune chance d’être vendus rapidement. Ils n’ont dès lors pas d’intérêt commercial. Néanmoins, dans les circonstances de l’exposition, lui, comme les autres visiteurs, s’y intéressait.
Vous êtes-vous lavé les mains ?, vue de l’exposition, 2021. CC-BY Bruno Goosse.
Dans l’écosystème des librairies de seconde main, la vitesse de circulation des livres et des images qu’ils contiennent est gage de leur survie, de leur préservation. Ce qui m’étonne quelque peu en pensant à la préservation du patrimoine ou à la conservation des œuvres dans les musées. L’entrée d’un objet dans le régime conservatoire des collections d’un musées le soustrait à l’échange commercial. Son inaliénabilité lui assure sa conservation au prix de son immobilisation. Il en va de même du bien immobilier qui est en quelque sorte figé dans sa forme lorsqu’il est inscrit sur une liste lui garantissant sa préservation lorsqu’il est classé3. L’immobilisation semble plus propice à la conservation que la circulation rapide. Avec ces livres, c’est le contraire.
La circulation de livres anciens contenant des images offre-t-elle une saisie adéquate à la question de l’image en tr@nsit ? J’ai relu l’objectif du programme : « envisager les phénomènes actuels de déplacements des images, que celles-ci soient matérielles ou mentales et culturelles, en s’attachant aux productions artistiques. »
La distinction proposée entre les images matérielles, les images mentales et les images culturelles, de même que les déplacements qui s’y réfèrent me font repenser à une phrase de Gilles Deleuze qui m’avait marqué en son temps. Elle se trouve à la fin de l’ouvrage « L’image-mouvement ». Après avoir montré la rupture du lien sensori-moteur, en le situant chronologiquement à la sortie de la seconde guerre, Deleuze s’interroge sur ce qui maintient encore ensemble le monde sans totalité ni enchaînement qu’il décrit : « Ce qui fait l’ensemble, ce sont les clichés, et rien d’autre. Rien que des clichés, partout des clichés… ». Puis, poursuivant son raisonnement, en parlant de John Dos Passos :
Ce sont ces images flottantes, ces clichés anonymes, qui circulent dans le monde extérieur, mais aussi qui pénètrent chacun et constituent son monde intérieur, si bien que chacun ne possède en soi que des clichés psychiques par lesquels il pense et il sent, se pense et se sent, étant lui-même un cliché parmi les autres dans le monde qui l’entoure. (Deleuze, 1983, p. 281.)
Par l’ampleur de son mouvement, l’enchaînement des déplacements produits, cette phrase me donne le vertige. Deleuze glisse d’abord des images aux clichés, il les fait flotter autour de moi, comme des objets, aussi matériellement que des feuilles mortes dans le tourbillon d’un vent d’automne ou des algues dans un bain de mer en été. Il convoque ensuite le monde extérieur dans lequel circulent ces clichés. Je pense aux cartes postales, qui s’achètent, s’écrivent, s’envoient. Mais je dois déjà réajuster ma compréhension car les clichés (ou les images, puisque c’est ici pareil) « pénètrent chacun », me pénètrent donc, me contaminent. « Cliché » est alors entendu un son sens imagé. Je pense avec les clichés, je sens avec eux, je vois avec eux. Ils me font sentir et percevoir le monde comme ils me font me percevoir et me sentir et finalement, au terme de ce double mouvement d’enveloppement et de pénétration, « je » est un cliché.
La bibliothèque idéale d’Empain, détail, 2021, CC-BY Bruno Goosse.
La formulation de la phrase de Deleuze me semble entrer en écho avec l’objectif du projet de recherche Image en tr@nsit qui consiste à s’intéresser aux phénomènes actuels de déplacements des images (matérielles, mentales, culturelles). Seule la dimension actuelle de ces phénomènes n’est pas rencontrée. Publié en 1983 le texte situe la crise de l’image-action au cinéma au moment du néoréalisme Italien, soit près de 40 ans plus tôt. Mais il se joue souvent de la chronologie, citant également des films plus récents. Et il trouve déjà un exemple de la rupture du lien sensori-moteur chez Dos Passos, soit après la première guerre mondiale. Je me risquerai donc à considérer qu’il n’est pas impossible de laisser de côté, pour un temps, la nécessité de l’actualité des images afin d’interroger quelques déplacements d’images plus anciens dont la connaissance n’a été rendue possible que grâce à une pratique bien actuelle : la mise en réseau des librairies de seconde main.
Ce détour par Deleuze m’encourage à poursuivre l’intuition initiale qui semble maintenant plus proche du cadre proposé, mais il infléchit tout de même quelque peu l’approche en insistant d’avantage sur la notion d’action. Pour Deleuze la crise de l’image-action coupe la perception de son prolongement moteur, l’action, condition nécessaire à l’émergence d’une nouvelle image qui ne soit pas un cliché. « Avec quelle politique et quelles conséquences » se demande-t-il ? Quelque chose se joue entre l’action, l’image (et son double altéré, le cliché) et l’inaction, ou entre le déplacement, l’image et l’immobilité. C’est donc pris dans ces tensions, en transit, que se situe cette contribution.
Ce détour imprime également sa marque à la forme du texte lui-même, en raison du rappel du risque que les enchaînements font courir aux images4. C’est à plusieurs balades5 que le lecteur est convié : la balade d’Empain, celle de Michelin, celle plus courte de Dumoulin, sans oublier celle qui nous a conduit à l’exposition « vous êtes-vous lavé les mains ? » à l’été 78 et qui a déjà été effectuée. Le manque d’adéquation qu’indiquait déjà le discret infléchissement se pose à nouveau entre ces quatres récits. « L’hypothèse d’une décoïncidence … [qui permet de penser] ce qui restait sans rapport entre les deux sens discernés de coïncidence – de rencontre fortuite ou complète adéquation » (Jullien, 2017, p. 53) permettra d’en faire jouer les rapports.
Louis Empain est un des deux fils du richissime industriel et banquier Edouard Empain qui a construit sa fortune à la fin du XIXe et au début du XXe siècle essentiellement dans les moyens de transports. Il a notamment construit le métro de Paris. Louis hérite de la moitié de la fortune amassée par son père. Contrairement à son frère Jean, il ne poursuivra pas les affaires familiales, mais consacrera sa vie à différentes activités philanthropiques dont la plus importante et la plus connue est la fondation Pro Juventute6 .
Vous êtes-vous lavé les mains ? édition, 2021, CC-BY Bruno Goosse.
La philanthropie est suspecte. Nous savons que les philanthropes historiques américains visaient, à travers leurs actions bienfaitrices, l’amélioration de leur image dégradée de grands capitalistes considérés comme des prédateurs par leurs concitoyens. Nous savons également que la philanthropie vise à limiter l’action régulatrice de l’État sur le capitalisme. Autrement dit, la philanthropie apparaît comme un système de sauvegarde du capitalisme et des fortunes qu’il génère (Reich, 2018).
La philanthropie de Louis Empain est un peu différente. Contrairement à Rockefeller ou Carnegie, Louis Emapain n’a pas été un industriel et un philanthrope. Son père a été un industriel et il a été philanthrope. D’autre part, ses activités philanthropiques lui ont coûté sa fortune. Néanmoins, il décidait bien seul à quoi il allait consacrer son argent. Il ne s’agissait pas d’une politique publique qui se définit sur la base d’un débat démocratique, mais d’une personne privée qui avait les moyens de mettre en œuvre ce qu’il jugeait souhaitable pour ses contemporains. Ses moyens étaient tels qu’ils lui permettaient de ne devoir ni négocier ni même discuter ses actions. On peut donc supposer que ses actions philanthropiques correspondent à ses intentions philanthropiques. Cette rare coïncidence entre l’intention et sa mise en œuvre permet de négliger l’influence de contextes accidentels.
Louis Empain considère qu’il existe « un problème de la jeunesse ». Il l’explique ainsi :
Les rapports entre adultes et jeunes sont pleins de malentendus. C’est que ceux-là portent en eux l’image d’un monde fixe [emphase ajoutée] et leur attention est accaparée par leurs difficultés quotidiennes, tandis que ceux-ci, naturellement indécis, évoluent parmi des besoins et des aspirations qui prennent formes peu à peu dans un monde nouveau7.
Son analyse tend à opposer l’immobilité d’une image fixe à un monde en devenir, un monde en mouvement. Aussi, en 1938, a 30 ans ─ on suppose qu’il ne porte pas encore en lui l’image d’un monde fixe ─ a-t-il créé la fondation Pro Juventute afin de « servir pleinement la jeunesse belge, et créer, pour elle, dans toute la mesure de ses moyens, des conditions favorables à son développement physique, moral et intellectuel8.»
La classe en plein air d’Empain et la bascule de Fragonard, détail, 2021, CC-BY Bruno Goosse.
La mission que Louis Empain s’est fixée est de veiller à la fois à l’hygiène des corps et à l’hygiène de l’esprit de la jeunesse. Il dit « attacher une grande importance à la valeur physique des jeunes […] pour empêcher des êtres débiles, mais sains, de glisser vers la maladie » et porter une attention à la formation de l’esprit en voulant préserver «les valeurs morales, intellectuelles et artistiques de notre jeunesse9 ». C’est dans le cadre de cet intérêt moral, qu’Empain, en compagnie de Marcel Jadin, rédige le livre Nos enfants lisent, Répertoire des meilleurs livres pour la jeunesse, mis à jour annuellement, publié par sa propre maison d’édition, Les Éditions du soleil levant, de 1954 à 1960. 33.500 exemplaires de Nos enfants lisent ont été imprimés durant cette période. Ce livre se propose d’aider parents et éducateurs à s’orienter dans l’ensemble des livres qui sont édités et qui pourraient être achetés pour les jeunes.
Il ne s’agit plus, comme ce fut le cas depuis le Concile de Trente, d’établir la liste des livres qu’il est interdit de lire, mais plutôt celle des livres que l’on peut acheter les yeux fermés, en faisant confiance à celles et ceux qui les ont lus et validés. L’Index des livres interdit (Index librorum prohibitorum) n’a été supprimé qu’en 1966, mais la dernière édition datait de 1948 et on comprend bien que plus on publie de livres, plus il est compliqué de prendre connaissance des livres qui méritent d’être interdits. Les censeurs se sont sans doute retrouvés débordés par la quantité. Aussi, Empain propose plutôt un guide pour se retrouver dans ce monde en expansion des livres imprimés. Il indique ce qui a de la valeur à ses yeux, ce qui vaut la peine, ce qui vaut le détour comme auraient pu dire les frères Michelin. Pour chaque livre recensé il est indiqué s’il convient uniquement à des garçons ou à des filles, s’il convient plutôt à des garcons ou à des filles ou s’il est pour tous.
L’avant-propos témoigne d’un souci de transparence en expliquant que le Conseil d’administration de Pro Juventute a constitué une commission du livre de jeunesse. Chaque livre est d’abord lu par un adulte. S’il considère qu’il s’agit d’un bon livre, il sera alors lu par trois jeunes qui remettront un rapport et une évaluation du livre.
Vous êtes-vous lavé les mains ?, vue de l’exposition, 2021. CC-BY Bruno Goosse.
La suite du texte tente de définir ce qu’est un bon livre. L’explication n’est pas très aisée à saisir : il faut un bon style et que la lecture soit saine. Il faut aussi « que le héros, qui sera admiré par le lecteur, soit » humain mais honnête » et marqué de ces qualités que nous souhaitons à nos enfants ». Puis, il explique ce qu’il redoute :
Certaine littérature écrite spécialement et commercialement à l’intention des jeunes flatte les sentiments les plus malsains et les plus bas instinct de l’âme humaine ; il ne faut pas être médecin ou psychiatre pour s’apercevoir que tous les garçons y trouvent un plaisir inacceptable.
Et nous connaissons dans une même collection certains romans mêlés à de très bons livres, où l’unique souci de l’auteur est de présenter à chaque page des scènes de ligotage entre garçons enchaînés ou flagellés, le tout baignant dans une écœurante atmosphère de sadisme.
Quant aux parents, qui se fient parfois aux titres des collections et aux images des couvertures où sont campés des garçons sains et forts, ils ne se douteront jamais de la pourriture que le livre contient. (Empain & Jadin, 1954)
Il est en quelque sorte question de ne pas se fier aux apparences et d’éviter les mauvaises rencontres, de ne pas prendre le risque, de ne pas se jeter dans l’expérience de la lecture.
Voulant me faire une idée plus précise de ces livres, j’en ai acquis un certain nombre rassemblés sous les rubriques destinées aux lecteurs et lectrices âgés de plus de 15 ans. J’ai d’abord essayé de trouver tous les livres appelés instructifs (explorations, mœurs, coutumes et traditions de divers pays). Grâce à la mise en réseau des bouquineries évoquée précédemment je les ai presque tous trouvés.
Les « livres instructifs » sont tous illustrés de photographies à l’exception d’un seul, consacré au Canal de Suez, illustré de dessins. Ces livres sont tous considérés convenant plutôt aux garçons ou convenant uniquement aux garçons, à l’exception de ceux de la collection Hatier-Boivin « hommes et bêtes » qui conviennent à tous. Mais parmi la catégorie des « livres instructifs », illustrés de photographies, je ne trouve pas de livre qui, selon les recommandations d’Empain & Jadin conviendraient aux filles.
La bibliothèque idéale d’Empain, détail, 2021, CC-BY Bruno Goosse.
Ces « livres instructifs » racontent pour la plupart un voyage vécu comme exceptionnel, en dehors des sentiers battus, des lieux connus, des lieux communs. Il s’agit toujours d’une première fois, d’une rencontre avec un lieu encore inconnu et on imagine que les images qui nous sont offertes sont des images de cet inconnu. On trouve par exemple : des récits d’escalades : Annapurna de Maurice Herzog, Himalaya, passion cruelle de Languepin, Victoire sur l’Aconcagua de Ferlet et Poulet ; récits de désescalade : Le gouffre de la Pierre Saint Martin d’Haroun Tazieff, L’aventure sous-Marine de Philippe Diolé, et encore des voyages lointains : Mon tour du monde en bateau stop, À la poursuite du soleil, Sur la route du retour, La forêt des souris-volantes…
Le plus souvent, les histoires se ressemblent : un jeune homme, sportif et volontaire, se fixe un objectif ambitieux : se rendre quelque part, en un lieu du monde particulièrement difficile à atteindre, particulièrement hostile. Il s’y rend en expédition avec d’autres jeunes comme lui, dont l’un est équipé d’un appareil photographique afin de documenter son exploit et d’en rapporter des images. L’auteur du livre est l’acteur d’une aventure. Les images sont la preuve de l’exploit ou de l’exploration. Elles permettent au lecteur du livre de suivre l’aventure. Le lecteur vit l’aventure depuis son fauteuil. Le récit individuel est à l’image du récit de société : l’exploit permet l’exploitation. Au prix d’un engagement corporel, parfois dangereux, souvent douloureux, les images sont capturées en un lieu jusqu’ici inaccessible et rapportées à ceux dont le corps est resté en terrain connu montrant ainsi qu’aucun recoin du monde ne pouvait échapper à l’emprise de l’homme occidental.
À quels déplacements des corps correspondent les circulations des images ?
En 1900 déjà, lors de l’exposition universelle de Paris, Louis Jules Dumoulin, auteur d’un célèbre panorama animé intitulé le Tour du monde expliquait dans la promotion de l’attraction qu’elle permettait aux visiteurs de voyager sans subir les désagréments (fatigue, ennuis) et les risques d’un voyage réel. Louis Jules Dumoulin, peintre officiel de la Marine, avait été missionné par le Ministère de la Guerre et de la Marine pour effectuer un voyage autour du monde, afin d’en rapporter des croquis, des peintures et des photographies. Il en profita pour recruter, selon Julien Beal10, des autochtones11 (acteurs, chanteurs, danseurs, etc) qui avaient pour rôle d’animer son panorama. Il était donc question de ramener des images et des personnes des voyages pour permettre au visiteur de se projeter dans ces régions lointaines.
Cette même année 1900, pure coïncidence, André et Édouard Michelin ont eu l’idée d’éditer un guide pour favoriser le déplacement des Françaises et des Français et favoriser ainsi leur commerce de pneumatiques. « À une époque où le voyage relève de l’épopée – en 1900, les routes étant souvent mal indiquées voire dangereuses, les temps de trajets longs –, le Guide MICHELIN veut faciliter la vie des voyageurs12 ». Il propose une liste de garagistes ou de médecins, des cartes routières et des plans de ville, des informations touristiques et des conseils pratiques : comment changer un pneu ou faire son plein d’essence.
Au même moment, dans des contextes très différents, un même problème est identifié : les voyages sont longs et dangereux. Les solutions proposées sont néanmoins opposées. La première consiste à éviter le problème en faisant voyager les gens de manière imaginaire, la seconde consiste à les aider à dépasser le problème pour les faire voyager réellement. Dans un cas, on ramène des images de là-bas pour les faire voir ici, dans l’autre, on conçoit ici des guides pour avoir la possibilité d’aller là-bas.
Dès 1902, le guide Michelin offre à ses lecteurs des informations touristiques. « Dans le chapitre des distances apparaît une petite étoile qui attire l’attention sur « les curiosités à visiter, monuments, buts d’excursion« jugés « d’un niveau intéressant« .» (Michelin & Cie, 2004, p. 71). Indiquer des curiosités naturelles ou monumentales déplace l’intention d’origine du guide qui était de favoriser un déplacement en aidant le voyageur à s’orienter. Car les curiosités ne sont pas seulement des points de repères possibles mais aussi des incitants au voyage. Telle curiosité vaut le détour, telle autre vaut le voyage. L’invention de ces points d’intérêts transforment les lieux réels en un système de valeurs adossé au voyage. Les lieux ainsi qualifiés deviennent des désirs de voyage.
Michelin et Dumoulin se retrouvent sur un point. Avec son Panorama du Tour du Monde, Dumoulin propose aux visiteurs de voyager sans en subir les inconvénients. Il distingue ce qui n’a pas de valeur, les inconvénients du voyage, de ce qui est valorisé : des vues de pays lointains, habitées de figurants, acteurs ou artistes. Le monde est ramené à son image, ou à son spectacle. De son côté le guide Michelin transforme le monde en curiosités à visiter. Pour inciter au voyage, il propose des descriptions de ces curiosité auxquelles s’ajoutent bientôt, leur image.
Or, ces deux approches présentent un autre point commun qui me semble concerner l’images en tr@ansit : dans les deux cas, l’image d’un ailleurs proposée au visiteur ou au lecteur n’a pas été réalisée sur place, elle est une réinterprétation ou une nouvelle élaboration réalisée à partir de celles qui a été rapportée. Entre ces deux temps, entre ces deux lieux, apparaît une forme de mutation de l’image.
Les immenses peintures du Panorama du Tour du monde de Dumoulin ont été réalisées sur place, à Paris (Beal, 2016). Pour les réaliser, le peintre s’est servi des photographies ─ certaines photographies, contenues dans sa collection sont maculées de peinture ─ et des croquis réalisés lors de ses voyages et missions officielles. Mais ces documents ne sont pas rendus publics. Autrement dit, il y a bien une image qui voyage, mais ce n’est pas celle qui est montrée.
Dans les guides Michelin, les images sont des gravures réalisées à partir de photographies. Ce procédé s’est maintenu jusqu’en 1983. Sauf si le graveur inscrit lui-même ses initiales au bord de son image, l’auteur de la gravure n’est pas indiqué alors qu’une mention de l’auteur de la photographie l’est presque toujours. On trouve parfois l’indication « horizons de France » qui n’est pas le nom d’un photographe, mais d’un éditeur. J’en déduis que ce n’est pas vraiment l’autorialité qui est visée par ces mentions mais plutôt l’information que la gravure a été réalisée à partir d’une photographie. Or la photographie est nécessairement prise sur place. Ce procédé, graver d’après photographie, permet de faire disparaître toute trace d’éléments factuels datables (automobile, mode vestimentaire, fils électrique…) pour produire une image temporellement homogène, tout en affirmant qu’il s’agit bien d’une réalité enregistrée. Ici aussi l’image qui a voyagé n’est pas celle qui est montrée.
Un paysage provençal, Guide vert Provence, 1946, © Manufacture de caoutchouc Michelin.
On pourrait invoquer une raison technique liée à la qualité de l’impression mais, en 1917, lorsque Michelin édite son premier guide consacré aux Champs de bataille, inaugurant une série de 31 guides sur le même sujet, le récit des opérations militaires est illustré de plans et surtout de photographies tirées des fonds iconographiques de l’armée. Dans ce cas, l’image ne devait pas être réinterprétée et la reproduction de photographie n’était pas un problème technique.
Les batailles de l’Yser, 1919, © Manufacture de caoutchouc Michelin.
C’est dans un second temps, après l’édition de ces guides concernant presque l’actualité (le premier guide a été édité alors que la guerre était toujours en cours) que la gravure s’est imposée pour représenter les « curiosités » leur conférant, par le traitement graphique propre à la gravure, une meilleure lisibilité, une plus grande homogénéité, voire une idéalité permettant une certaine permanence. Une « curiosité » est souvent un bâtiment ou un site bénéficiant d’un cadre légal de protection dont le but est d’éviter toute altération ou transformation, comme une fabrication de clichés immuables. Les gravures sont conçues pour être reproduites. Parfaitement reproductibles, rien ne change, d’une édition à l’autre. La France est transformée en images immuables et reproductibles à l’infini. Le guide permet de s’orienter dans cet ensemble d’« images flottantes, de clichés anonymes qui circulent dans le monde…. » en choisissant pour nous ce qui est à voir, ce qui est à faire, il nous évite la possibilité ou le risque des rencontres hasardeuses.
On a vu que le répertoire de Louis Empain, Nos enfants lisent, suivait un objectif similaire : éviter certaines rencontres. Empain choisit ce qui est à lire, mais aussi qui le lira. Les premiers livres achetés, correspondant à la catégorie « livres instructifs » sont jugés convenir plutôt aux garçons de plus de 15 ans, à l’exceptions des livres à visée ethnologique qui sont considérés convenant à tous. Il me manquait donc des livres convenant plutôt aux filles de plus de 15 ans et je me suis mis à la recherche de catégories leur étant majoritairement destinées. Comme on peut s’y attendre, le simple titre de ces catégories explicite les rôles réservés aux filles dans le modèle idéal de société proposé par le philanthrope : les romans ayant pour sujet le dévouement à la famille, et les romans de l’orphelin. S’y ajoute celle des romans d’amitiés et d’amour qui fait l’objet d’une introduction explicative :
Les romans d’amour ne conviennent pas, en principe, aux adolescents de moins de seize ans ; les livres que nous conseillons ici sous ce titre, décrivent l’amitié d’un adolescent et d’une fillette selon cet aspect un peu mystérieux qui bientôt conduira à l’amour ; (Empain & Jadin, 1954)
Presque tous ces livres destinés aux jeunes filles sont illustrés. Parmi ceux-ci, aucun ne l’est au moyen de photographies, fussent-elles réinterprétées sous forme de dessin. Il s’agit toujours d’illustrations dessinées, soit en noir et blanc, soit en couleur. Les photographies ancrée dans la réalité du monde sont réservées aux garçons, les fantaisies dessinées réservées aux filles ; à la naturalisation des genres se superpose une naturalisation des images illustratives.
La modernité, nous dit François Jullien, a été de « dénoncer une naturalisation de la transcendance, d’oser penser … que le fortuit n’est pas séparable de l’adapté, mais, comme le laisse lui même entendre le terme de coïncidence, peut en être la condition cachée. » (2017, P.142). La décoïncidence de François Jullien nous accompagne discrètement depuis le début de ces récits. Non pas pour expliquer, puisque on ne peut plus expliquer le monde faute d’adéquation entre des cause et des effets13 mais pour interpréter comme autant de variations et de reconfiguration du jeu du fortuit et de l’adapté (Jullien p. 144).
Les quatre trajets racontés ─ la recherche de livres anciens sur internet plutôt que leur rencontre en librairie, la sélection de livres qui conviennent aux jeunes en fonction de leur âge et de leur sexe par un philanthrope, la transformation des lieux de vie en curiosités à visiter par le guide Michelin, et la transformation du monde en un spectacle exotique par le Panorama du Tour du Monde de Louis-Jules Dumoulin ─ ne coïncident pas mais partagent fortuitement le même souci d’éviter le risque d’un imprévu. Chaque récit est pris comme un dispositif qui déplace images, lieux et corps en faisant jouer les similitudes et les différences de leur dispositif respectif.
Les images qui circulent aujourd’hui sur internet permettent non seulement l’accès à des images virtuelles mais aussi, parfois, à des images matérielles, comme celles contenues dans les livres anciens. C’est grâce à leur présence dématérialisée sur le réseau que ces livres et leurs images imprimées ne disparaissent pas matériellement. Oubliées dans les étagères du monde physique des librairies, ces images étaient perdues pour le monde. Au bord de la disparition, leur mise en circulation sur le réseau leur a permis de prendre leur revanche. Ces images sont, sur la toile, à la fois en transit et en sursis.
Parmi ces images, celles qui accompagnent les récits d’exploration et d’exploit, particulièrement abondantes, d’une part, attestent de la réalité d’une aventure et d’autre part, permettent le partage de ce qui a été rencontré sans avoir besoin d’y engager son propre corps. En ce sens, il s’agissait déjà de dématérialisation tant de la rencontre que de l’image.
L’image gravée d’après photo de ce que Michelin nomme « curiosité » participe de ce jeu de dématérialisation. En neutralisant la représentation d’éléments actuels, elle présente une image immobile du monde, elle le fait coïncider à son image, non pas par excès de réalisme, mais par son immobilisme même : l’image gravée est identique à elle-même au fil des éditions, sans être datable, comme la curiosité naturelle ou construite reste identique à elle même dans le temps en vertu de sa préservation. Et n’est-ce pas pour vérifier cette adéquation que les touristes se meuvent, que nous voyageons ?
Les moteurs de recherches agissent dans la masse d’informations du net comme les guides (touristiques ou pas) dans la matérialité du monde : ils permettent d’atteindre ce qui est visé, mais rendent la surprise de la rencontre improbable. La modification du rapport entre l’intention (la visée, le projet, la prévision) et l’accueil de l’imprévu est politique comme le montre le choix de livres et d’images sélectionnée par un homme pétri de bonnes intentions, voulant dépenser sa fortune au bénéfice de la jeunesse de son pays, ou du moins de son idée de la jeunesse. Regarder ces images aujourd’hui permet d’interroger, selon moi, un idéal de l’intention et son voisinage avec la volonté de domination du monde en opposition à l’accueil des aléas de la rencontre et au retrait qu’il favorise.
On dira qu’il s’agissait d’une époque. Mais aujourd’hui, les philanthropes que l’on qualifie parfois de nouveaux influent sur un nombre de recherches toujours plus important, les school boards censurent les bibliothèques14, les voyages sont si bien organisés qu’on peut s’assurer contre leur échec, et le monde est chaque jour transformé en son spectacle.
Vouloir éviter les mauvaises rencontres, par crainte de la contamination, finit toujours par éviter les rencontres, en confondant l’image de la rencontre et la rencontre elle-même, l’image de l’exploration et l’exploration, ou son exploration. Et il me semble qu’à ces exploits d’explorations de contrées qui ne demandaient pas tant d’attention violente ou de sommets qu’il n’était pas si important de gravir (ne les qualifiait-on pas d’inviolés ?) il eût été possible de ne pas négliger une exploration plus intime et la rencontre avec l’insoupçonné que nous sommes, fut-il constitué de clichés, le philanthrope Empain compris.
Bruno Goosse, La bibliothèque idéale d’Empain, détail, 2021, CC-BY Bruno Goosse.
Ce soir, encore, Thérèse est assise devant la table, et s’applique à disposer un ruban argent qui figurera le ruisseau. Elle a longtemps cherché comment représenter ce mince ruisseau qui courait au bas de la pelouse, dans le beau jardin de banlieue. Puis, en classe, une idée lui est venue brusquement. Tandis qu’une grande lisait, elle écoutait, d’une oreille un peu distraite, lorsqu’un groupe de mots frappa son esprit : « le ruban argenté de la rivière ondulait à travers champs, dessinant des méandres lumineux ». En effet, rien ne ressemblait mieux à un ruban d’argent que cette masse d’eau glissante et claire, Thérèse a saisi la poésie de cette image et, bien convaincue, c’est mise en quête d’un ruban. Cela n’a pas été tout seul, personne ne possédait le petit morceau de ruban argent nécessaire et, pendant plusieurs jours, elle a cru devoir y renoncer. (Piguet, 1952)
Bibliographie
Béal, J. (2016). La collection photographique Chine de Louis-Jules Dumoulin (1860-1924), 漢學研究 = Chinese studies. (21), pp. 212-219. ISBN 978-7-5077-5114-7 (hal-01375937).
Béal, J. (2020). Le manège aux chrysanthèmes : images et réalités des femmes japonaises dans le Panorama du tour du monde de Louis Jules Dumoulin (1860-1924) à l’Exposition universelle de Paris en 1900, dans Loxias-Colloques, 16. Représentations littéraires et artistiques de la femme japonaise depuis le milieu du XIXe siècle, URL : http://revel.unice.fr/symposia/actel/index.html?id=1578.
Deleuze, G. (1983). Cinéma 1, L’image-mouvement. Minuit.
Deleuze, G. (1985). Cinéma 2, L’image-temps. Minuit.
Empain, L. & Jadin, M. (1954). Nos enfants lisent, Répertoire des meilleurs livres pour la jeunesse. Les Editions du soleil levant, Namur.
Jullien, F. (2017) Dé-coïncidence, D’où viennent l’art et l’existence. Grasset, Paris.
Leparmentier, A. (2020-01-05). Philanthropie : aux États-Unis, les milliardaires dans leurs œuvres. Journal Le Monde. https://www.lemonde.fr/international/article/2020/01/05/la-philanthropie-passage-oblige-pour-les-milliardaires-americains_6024864_3210.html?random=1886290767
Moorehead, A. (1956). Australie, terre d’Uranium. Hatier-Boivin.
Piguet, A. (1952). Thérèse et le jardin. Éditions Bourrelier.
Reich, R. (2018). Just Giving: Why Philanthropy Is Failing Democracy and How It Can Do Better. Princeton University Press. ISBN 9780691202273
Non signé, (1938-05-20), Pour les Hommes de Demain. Une Magnifique Fondation du Baron Louis Empain : « PRO JUVENTUTE », L’opinion publique, journal hebdomadaire de la Ligue belge contre le cancer.
Sans auteur, (2004). La Saga du Guide Michelin, Michelin et Cie.
1Jullien, F., Dé-coïncidence, D’où viennent l’art et l’existence (2017). Grasset, Paris, pp. 29-30.
2« Vous êtes-vous lavé les mains », à l’été 78, Bruxelles du 14/11 au 18/12/2021.
3Voir le projet « classement diagonal » qui concerne la loi de protection du champ de la Bataille de Waterloo de 1917, projet qui a donné lieu à un livre du même nom (Goosse, 2018).
4« … l’image ne cesse pas de tomber à l’état de cliché : parce qu’elle s’insère dans des enchaînements sensori-moteurs, parce qu’elle organise ou induit elle-même ces enchaînements… » (Deleuze, 1985, pp. 32-33).
5« …ce qui a remplacé l’action ou la situation sensori-motrice, c’est la promenade, la balade, et l’aller-retour continuel. » (Deleuze, 1983, p. 280).
6Pro Juventute est une fondation créée par le baron Louis Empain, en 1938, en Belgique, pour venir en aide à la jeunesse.
7Article non signé, 20 mai 1938, Pour les Hommes de Demain, Une Magnifique Fondation du Baron Louis Empain : « pro juventute », L’opinion publique, journal hebdomadaire de ka ligue nationale belge contre le cancer, pp. 1-2.
8Ibid.
9Ibid.
10Julien Béal est l’auteur d’une thèse de doctorat en littérature générale et comparée : « Le Japon dans l’œuvre et la collection photographique du peintre Louis Jules Dumoulin (1860-1924) : enjeux imagologiques, idéologiques et artistiques ». Il et a largement alimenté la page wikipédia consacrée à Dumoulin.
11« Autochtones » (10 mai 2017) sera remplacé par « artistes locaux » (Thierry Caro, 10 juillet 2018). Notons également l’utilisation du mot « indigène » pour nommer ces personnes : « Pour animer les lieux, on avait mis en scène, au premier plan, de véritables indigènes se livrant à leurs occupations habituelles. » (Béal 2017).
12https://guide.michelin.com/be/fr/about-us consulté le 28-09-2023.
13Deleuze utilise la notion de rupture du lien sensori-moteur pour parler d’un écart semblable.
14Rouages essentiels d’un système éducatif public américain largement décentralisé, les conseils d’école sont composés de membres élus par la population dans la plupart des États. Ces school boards ont un rôle-clé : ce sont eux qui définissent les politiques éducatives et ce qui peut être lu – ou non. Il ne se passe pas une semaine sans que la presse se fasse l’écho de l’exclusion de livres de bibliothèques scolaire par ces Conseils d’école. Motivés par un intérêt pour la jeunesse similaire à celui d’Empain, ils excluent des livres des bibliothèques scolaires pour des raisons idéologiques : sexe, identité sexuelle, genre, racisme, les prétextes sont multiples et les titres censurés nombreux. Maus de Art Spiegelman a été exclu des école du Tenessee pour vulgarité et représentation de scène inappropriée.
Ce texte a été publié dans la Revue Turbulences #01 ǀ 2023. (Revue du LESA – Laboratoire d’études en sciences des arts – Aix-Marseille Université)